HISTOIRE DE PSYCHÉ. Long-temps avant le règne de l'empereur Adrien, des brigands désolaient la Thessalie. Un ravin perdu entre des monts, des bois et quelques pierres taillées et ajustées de main d'homme; une roche creuse, couronnée d'un peu de verdure, aux flancs lézardés, aux cintres irréguliers et comme rompus, aux abords tapissés de mousse, tel était leur repaire, et ils avaient pour tous serviteurs et commensaux un chien, un âne et une vieille femme, qui devait, elle, aux aus et à sa quenouille, qu'elle ne quittait que rarement, quelque ressemblance avec celle des trois sœurs qui tient aux enfers le précieux fuseau. Son front et ses joues sillonnés, ses mains amaigries, ses grossiers vêtemens, lui prêtaient je ne sais quelle harmonie et avec la sauvage âpreté des localités qu'on vient de décrire et avec le caractère et les habitudes des maîtres qu'elle avait à servir. Du reste, elle était habile entre toutes à rendre les heures plus courtes et à tromper l'ennui, au moyen de récits d'autrefois, de contes du bon vieux temps. Or, un jour qu'il s'agissait de distraire de ses douleurs une jeune et belle personne enlevée de la veille à ses parens dans l'espoir d'une riche rançon, et qu'à son costume aisément eussiez-vous reconnue pour être de haut lieu, la vieille fit choix de ce que son répertoire offrait de mieux. Assise par terre, sans plus de cérémonie, à l'entrée de la roche, l'âne, le chien, la jeune fille, une petite et boiteuse table non loin d'elle, elle se prit à dire l'histoire de Psyché. Et de fortune il advint que ce récit, au lieu de la plate ou prétentieuse niaiserie de nos Mère l'Oie et de nos Bibliothéques bleues, se trouva être « une fable la plus plaisante et » de la meilleure grâce que aye jamais été, soit, et sera. » C'est du moins ce que dit Georges de La Bouthière, Autunois, qui écrivait en 1553. Si bien que, depuis la vieille, c'est à qui reproduira son conte ou s'en inspirera; et peintres, et poètes, et sculpteurs, le roman et le théâtre, l'antiquité, la renaissance et les temps modernes, ne cessent de nous reporter, comme à l'envi, à ce thème, dont voici, à l'occasion de Raphaël et de ses crayons, quelques brefs ressouvenirs. |